Chapelier Fou
Cinq ans se sont déjà écoulés depuis l'arrivée de Chapelier Fou chez Ici d'ailleurs avec la sortie de son premier EP, « Darling Darling Darling » (2009)... Mais cinq ans, c'est finalement bien peu au regard de l'immense chemin parcouru par le Lorrain. Quatre EP, deux albums, plusieurs mises en musique de films, reportages, publicités (« Inside Out, épisode 1 » de JR, « Little from the fish shop » de Jan Balej, publicité Google Web Lab, collaboration avec Lab212 pour une exposition digitale au Barbican Center de Londres...) des concerts aux quatre coins du globe (Europe, Australie, Canada, Chine, Russie, Amérique du Sud...), des morceaux dans les playlists des djs les plus exigeants, une renommée d'ampleur internationale... Mais l'heure n'est pas encore venue de faire un bilan, aussi impressionnant soit-il. Car Louis revient aujourd'hui avec « Deltas » son troisième album, dont le titre annonce ses ambitions : sublimer l'existant, donner une dimension nouvelle à son œuvre, creuser sa singularité.
Cet album cristallise tous les éléments qui font la personnalité de Chapelier Fou, de la musique électronique à ces magnifiques mélodies au violon qui donnent la chair de poule. Mais il ouvre également le champs des possibles, par son panel d'émotions plus variées et un travail d'orchestration bien plus dense que sur ses précédents opus. Et si Chapelier Fou fut parfois qualifié de « bricoleur sonore », il obtient ici le statut de compositeur confirmé, que se soit en terme d'écriture, d’arrangement ou d'harmonie. De telles habilités ne s’acquièrent pas du jour au lendemain et résultent de sa capacité à se nourrir de ses expériences. « Deltas » ne se domptera pas à la première écoute tant le terrain d'exploration est vaste, les expérimentations nombreuses. Mais cela n’empêchera pas l'immersion. Ici, la complexité est synonyme de fascination. Et il faut bien le dire, le résultat est unique, car porté par une volonté d'exploration qui ne peut laisser insensible. Chaque titre est un magnifique et passionnant paradoxe, où l'évidente beauté des mélodies se mesure à des structures totalement inattendues, jamais balisées.
Et ça marche à tous les coups. On est happés, impressionnés par l'aptitude de Chapelier Fou à intégrer autant de détails et d'idées tout en restant incroyablement cohérent. Et pourtant, il y a toujours cette part de mystère qui englobe ses compositions, ici plus présente que jamais. On a décidément de plus en plus de mal à comprendre ce qui lui passe par la tête, à voir d'où il puise son inspiration. Cela s'explique peut-être par le fait que jamais la personnalité de Chapelier Fou n'a été aussi imposante. Tout en allant toujours plus loin dans sa démarche de compositeur, Louis évite le piège de l’austérité, grâce à une énergie communicative et un plaisir de transmission intact. Il y a tellement d'autres choses à dire sur « Deltas », mais cette fois les mots manquent, du moins ils ne permettent pas de lui rendre justice, pas encore. Il faudra probablement attendre son prochain album pour pouvoir poser un regard juste sur celui-ci, qui ne va cesser de grandir au fur et à mesure des années et des écoutes, mais aussi dans l'interprétation qu'en fera Louis sur scène, ou ailleurs. Plus qu'un disque, une fenêtre ouverte sur un possible avenir de sa musique.
Léonie Pernet
À une heure de Paris, Léonie Pernet a grandi l'humeur calée sur les mélodies d'ailleurs. Bercée par les ombres et les lumières croisées d'Aphex Twin, Philip Glass ou Patti Smith, elle s'est faite en jouant autant qu'elle le pouvait, entre piano et percussions, dans un solo foisonnant. Dans une classe du conservatoire, dans sa chambre et partout ailleurs. À 16 ans, elle a quitté l'école et a trouvé - évidemment - la musique comme horizon. Hyper instrumentiste, elle est passée compositrice et méta créatrice, imaginant des musiques pour le spectacle vivant et inventant pour elle avec une première performance bardés de sons et de flashs. À 18 ans, elle arrive à Paris, fait la nique au jour en déambulant la nuit. Noctambule invétérée, elle fait voguer les autres dans ses soirées Corps vs Machine. Elle finissait tard sans plus vraiment savoir quelle heure et quelle saison il était. Mais sans jamais perdre de vue le cap de la musique. Elle a joué de la baguette pour Yuksek en France et partout dans le monde, a continué à danser et composer dans sa chambre et puis elle est partie loin, à New York. Pas pour fuir. Juste pour aller plus loin. Pour imaginer plus, pour créer plus, pour rêver encore. Avant de revenir, le répertoire plus fort.