Mathieu Barbances a une dégaine bolchevique, des cheveux noirs et rebelles, des sourcils de charbon, la moustache gauloise et la barbiche léniniste. Il ouvre sa mâchoire vaste comme celle d’un ursidé sorti tout droit de la grotte de Lascaux, d’où jaillit une voix d’airain, comme projetée dans un mégaphone, cette voix qui désordonne les mâchoires, percutante, sonore, rugissante comme une tempête, volontaire, impérieuse comme un slogan dans une manif, comme un mot d’ordre à la Fête de l’Huma.En forme de canoë géant sa contrebasse à l’embonpoint maternel, nous entraîne sur un fleuve capricieux, tourmenté, comme une descente de rapides dans un rafting tourbillonnant au milieu des écueils.Il la pétrit, la malaxe, la griffe, la gifle de claques sonores dans un slap d’apocalypse. D’autres fois il la caresse rêveusement du bout de son archet, soulevant de petits nuages de colophane, et tout ça en débitant des textes pétris de chair et de sens, comme une chanson anthropologique qui dit la vie, sa vie dans une évidence qui fait que nous y reconnaissons aussi la notre.
Claude Astier