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Mains d'Œuvres

La nécessaire mobilisation

L’incontournable pôle culturel du 93 lutte contre la municipalité de Saint-Ouen, qui a pris la décision de ne pas renouveler son bail. Sa directrice, Juliette Bompoint, revient sur ce nouvel épisode du combat de la culture pour exister. Pour les soutenir, devenez AMO ( Ami de Mains d'Œuvres), c'est prix libre !

Quand avez-vous été prévenu de la municipalité de la fin de votre bail ?
En 2014, dès son arrivée, le maire (William Delannoy, UDI, NDLR) a tout à la fois annoncé le retrait de la subvention de Mains d'Œuvres et le fait de vouloir récupérer le bâtiment dans lequel nous travaillons depuis près de vingt ans pour construire le nouveau conservatoire. Le retrait de la subvention en cours d'année a généré une cessation de paiement, donc pendant plus d'un an, nous avons été mobilisés sur la restructuration de l'association, en considérant que le projet de conservatoire était très coûteux pour la ville et, sincèrement, pas très avancé, voire peu fondé dans un bâtiment à réhabiliter plutôt que sur un nouveau terrain de la ville. La fin de notre bail approche (prévu fin 2017) et le projet de nouveau conservatoire n'est toujours pas très avancé.

Récupérer vos locaux pour y installer un conservatoire. Que répondez-vous à cet argument ?
On soutient profondément le fait d'avoir un nouveau conservatoire à Saint-Ouen ! Ce n'est pas à nous qu'il faut expliquer qu'une offre pour l'éducation artistique est essentielle et que celui qui existe actuellement n'est pas adapté à un projet plus collectif et progressiste. Mais de là à déshabiller Jacques pour habiller Paul… On ne comprend pas cette logique, d’autant que nous avons régulièrement proposé de collaborer à une conception commune du projet, voire de partager des espaces, puis-que nous accueillons déjà des cours du conservatoire, et que les jeunes créateurs que nous accompagnons travaillent surtout la journée.

Êtes-vous subventionné par la mairie et lui coûtez-vous trop d’argent, ce qui expliquerait en partie sa décision ? Combien de personnes sont-elles concernées par cette décision ?
Nous ne recevons plus de subvention de la ville de Saint-Ouen, mais de l’État, de la région, du département, des villes de Paris et Saint-Denis à hauteur de 40% de notre budget de fonctionnement. La négociation a amené à ne payer plus qu'un loyer de 1 euro à la ville, ce qui finalement peut être un vrai soutien de leur part, mais on ne considère pas au quotidien que cela leur coûte beaucoup d'argent. Par contre, l'activité que nous générons sur la ville (plus de 150 événements par an) peut être considérée comme un véritable apport. Plus de 20 salariés sont embauchés en CDI, 11 services civiques, 250 résidents et 25 000 spectateurs chaque année, plus tous ceux qui viennent y faire du sport, manger… Toutes ces personnes seraient concernées.

Une fois de plus, ce sont les territoires de l’art qui vont trinquer, au profit d’une culture institutionnelle, moins populaire.
On ne veut surtout pas opposer les deux, elles sont complémentaires. Les lieux intermédiaires, que nous appelons maintenant "lieux participatifs de culture augmentée", prouvent aujourd’hui qu'avec un peu de subventions, on peut faire beaucoup pour l'intérêt général.

Concrètement, comment allez-vous lutter pour que la municipalité change d’avis ?
Notre projet doit parler de lui-même. Mains d'Œuvres est un lieu emblématique, il en a inspiré beaucoup d'autres et a écrit une page des politiques culturelles. Cet épisode interroge profondément sur la structuration de ces projets et des formes de coopération solidaire que nous pourrions réinventer grâce à notre savoir-faire : nous avançons vers la création d'une société coopérative d'intérêt collectif, "La Main 9-3.0", qui apporterait une nouvelle vision des lieux sur un territoire, qui pourraient se réunir pour être plus forts ensemble.

Quels sont les plus gros succès de Mains d’Œuvres, qui pourraient faire pencher la balance en votre faveur ?
On n’aime pas trop s’appesantir sur nos lauriers, mais les 15000 artistes passés par Mains d'Œuvres, les centaines de professionnels de la culture qui y ont appris leur métier, les dizaines de milliers de projets qui y ont vu le jour parlent pour nous. Sans oublier la poésie que l’on peut apporter au quotidien de tous, à travers le festival MOFO et tous ceux que nous développons de manière générale, la capacité à fédérer autour d'événements artistiques et festifs plusieurs milliers de personnes sans beaucoup de moyens à la base, comme par exemple la traversée urbaine de la Seine-Saint-Denis avec le duo d'artistes Boijeot-Renauld, au mois d'avril.

1, rue Charles Garnier 93400 Saint-Ouen
www.mainsdoeuvres.org

—  Youri

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