En chameau et en boubou dans les rues de Bruxelles sur fond de guitare électrique cinglante et de transes tamasheq... Voilà le décor qu’a choisi le groupe Kel Assouf pour le clip "Europa", extrait de son dernier album Tikounen (Igloo Records, sorti début 2016). Etrange patchwork, musique métisse. Depuis leurs précédents projets, les musiciens touaregs, qui ont quitté les dunes de sables pour le plat pays, nous avaient habitués à créer des ponts imaginaires entre les répertoires, musique touareg, afrobeat, blues, reggae ou le funk. Cette fois-ci, ce sont aux lézardes rock saignantes d’affronter les youyous : "Une nouveauté dans toute l’histoire de la musique touareg", avance Anana Harouna, le fondateur du groupe, exilé en Europe depuis dix ans. Impossible pour le chanteur-guitariste de délaisser la culture tamasheq ("même si je suis ici, j’ai le désert dans mon sang"), de ne pas témoigner des souffrances de son peuple. Charges frontales ou complaintes, cris de colère entre les portées, incisifs comme des haïkus japonais... Les "fils de l’éternité" (Kel Assouf en Tamasheq) veulent "sortir quelque chose qui fait mal, comme un cri". Un cri de rébellion, magnifié par le producteur-musicien tunisien Sofyann Ben Youssef. On retrouve la présence de la chanteuse Toulou Kiki, actrice du film acclamé "Timbuktu" de Abderrahmane Sissakoqui, une façon de rappeler la tradition féminine de la culture touareg. Des déserts du Niger aux jungles urbaines, Kel Assouf souffle un vent de révolte.
03/06/2016 – New Morning Paris 10